Ce n’est que peu à peu que j’ai découvert qui ces gens étaient vraiment.


 Il y a des matins où l’on se dit « à quoi bon, faut-il encore une suite ? », ces matins de grands crashs, ceux qui vous cassent la tronche, vous rient au nez, vous hurlent de vous lever autrement. Je viens d’emménager dans mon nouveau quartier. C’est la zone, m’a-t-on dit. Tu ne resteras pas, on ne s’habitue pas, ça s’appelle un ghetto … t’entends un GHETTO ! Tu ne fais pas partie de leur monde, tu n’y as pas grandi, blablabla que je t’en remette une couche.

Il y a tellement d’histoires à raconter depuis bientôt 20 ans qui ont tissé nos fraternités. Chez toi, il y a toujours deux parts en plus pour celui ou celle qui viendra. Tu m’as dit qu’un sourire ouvre toutes les portes et que la tienne est ouverte de jour comme de nuit, que les problèmes sont un luxe, que c’est possible ; qu’ ici, tu es chez toi. Tu n’as pas hésité à me demander et avec toi, j’apprends à oser en retour, avec simplicité.

Le ghetto est à l’intérieur de nos têtes, de nos cœurs ….  ou pas.

Cornet – août 2022.


Extrait d'un texte de Fabien, à propos de nos identités communes, multiples.


L’auteur de ces lignes est né sous le signe du chien, et c’est donc la laisse du conformisme qui m’attache au monde. Et si je me fais cette réflexion, c’est après avoir lu l’article d’un cinéaste qui se proclame proféministe, car, écrit-il, il est impossible pour un homme d’être féministe dans la mesure où il n’a jamais eu à souffrir de la domination masculine comme les femmes ont à souffrir de cette domination. Il ajoute, pour étayer son argument, qu’il connaît des hommes féministes qui regardent des films pornographiques. Mais en quoi les féminismes relèvent-ils de la morale ? Suffit-il qu’un homme cesse de fréquenter des prostituées qu’aussitôt cesse la violence masculine ? Les ligues de vertus, souvent animées par quelques féministes courageuses, ont cru qu’en prohibant l’alcool, les hommes cesseraient d’être indolents ou violents. L’époque de la prohibition aux Etats-Unis a-t-elle éliminé la violence masculine ? Ne l’a-t-elle pas plutôt renforcée ? Donc, pour faire mon portrait, je dois éliminer tout souffle moralisateur, qui empêche de me voir tel que je suis.

Qui suis-je ? Tel que je suis, je suis ce que ma mère a été pour moi (une femme d’une grande rigueur morale), ce que ma grande tante a été (une résistante des 1ère et 2ème guerres mondiales, et que j’admirais tant), ce que ma grand-mère         a été (une mélomane passionnée par Chopin, et hantée par l’illusion d’être aimée), ce que ma marraine a été (qui cachait mal son antisémitisme traitant Sharon, et à la fin tout le monde, même les pigeons, de charogne). Pour faire ce portrait, je dois remonter le temps, et voir à nouveau l’enfant qui allait chercher la tarte au riz dans la cave de la maison de ma grande tante, goûter à ses soupes qui étaient faites avec un peu de lait, lire les livres de ma mère ou manger la caldérade, le plat maison, regarder les croquis de ma marraine, et, comme la nature fait de chacun de nous un individu unique, pareil à un flocon de neige dont aucun n’est semblable à un autre, je suis, moi aussi, un individu unique.


Fabien, sur l'inégalité des genres 


A Marie-Eve, qui évoque la guerre des sexes menée par les féministes, je réponds que les féministes ne sont pas opposées aux hommes, au contraire, mais opposées au patriarcat, l’ennemi principal. Et si le patriarcat permet aux hommes d’asseoir leur domination sur l’autre sexe, des hommes, aussi, peuvent souffrir du patriarcat. Des hommes ont souffert du service militaire. Certains n’assument pas la charge de chefs de famille. D’autres ne sont pas carriéristes. Enfin, des hommes apprécient de prendre un bain, n’aiment pas boire, ne pissent pas debout.

Freud a demandé à Marie Bonaparte : que veut la femme ? Dans « La Sexualité de la Femme », la psychanalyste écrira avoir rencontré trois sortes de femmes : la femme soumise (à son sexe, c’est-à-dire à l’Eternel féminin tel que le souhaite le patriarcat), la femme résignée et la femme révoltée. A propos de cette dernière, Marie Bonaparte évoque un rêve dont elle prétend qu’il est plus courant qu’on ne l’imagine. Dans ce rêve, la femme révoltée voit son sexe sortir du vagin pour pénétrer le sexe de son partenaire.

Entendu dans un café, un homme qui, ému par une musique très kitsch, s’exclamer : « Tu peux conduire une femme à l’hôtel et la monter au paradis en lui faisant écouter cette mélodie ! ». Mais quelle femme ? La soumise ? La résignée ? La révoltée ? Considérant la panse (énorme) de l’homme, je penche pour la résignée.

J’avoue que j’aurais préféré être une femme, et participer à la lutte pour l’abolition du patriarcat. Comme femme, j’aurais été membre de la Roxy Secret Society, un cercle féministe qui prône la séduction d’hommes riches pour les déposséder de leur fortune et de rendre aux femmes leur juste dû. Au sein de la société secrète, j’aurais été une dominatrice comme la baronne Tara Domina :

- Oui, QUI ?

- Oui, maîtresse.